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Facturation

Évaluer la rentabilité d’un soin hors nomenclature : combien faut-il facturer pour être rentable ?

Vous avez investi dans un laser, une cryo ou un appareil d’ondes de choc ? Parfait. Mais savez-vous à partir de quel tarif chaque soin devient réellement rentable ? Proposer un soin hors nomenclature (HN) est devenu une voie de plus en plus fréquente pour les masseurs-kinésithérapeutes libéraux. C’est l’opportunité d’enrichir son offre, de valoriser une expertise spécifique et de s’affranchir des tarifs stricts imposés par la NGAP. Mais cette liberté tarifaire s’accompagne d’un impératif économique : comprendre à quel prix votre soin devient réellement rentable. L’enjeu est loin d’être anecdotique. Trop bas, votre tarif ne couvre pas vos charges. Trop élevé, il freine l’accès des patients et peut susciter la méfiance. Trouver le bon équilibre exige donc de connaître, dans le détail, vos coûts réels, vos charges sociales et fiscales, et la valeur ajoutée de votre prestation.

Comprendre ce qu’est réellement un soin hors nomenclature

Un acte hors nomenclature désigne tout soin non remboursé par l’Assurance Maladie. Cela inclut des techniques innovantes (ondes de choc, cryothérapie, laser haute intensité, pressothérapie, etc.), des bilans fonctionnels approfondis, du coaching postural ou sportif, ou encore des approches complémentaires comme la kiné esthétique ou la rééducation périnéale non prescrite.

L’acte HN se distingue du dépassement d’honoraires : il n’est pas “en plus” d’un acte remboursé, mais totalement hors du cadre conventionnel. Le kinésithérapeute est donc libre de fixer son tarif, à condition d’informer le patient que le soin ne fera l’objet d’aucun remboursement. Cette transparence est une exigence déontologique : le patient doit être informé du coût et de la nature du soin avant la réalisation.

En pratique, le tarif doit être déterminé à partir d’un raisonnement économique solide : identifier ses coûts, intégrer ses charges sociales, puis fixer une marge cohérente avec la valeur perçue par le patient.

Guide complet sur les dépassements d’honoraires et les actes hors nomenclature kiné

Connaître le vrai coût de votre soin : le socle de toute tarification

Avant toute réflexion sur la tarification, il faut connaître le coût réel d’un soin. Trop souvent, les kinés évaluent leur rentabilité en se basant sur leur chiffre d’affaires, sans mesurer la part absorbée par les charges. Or, en libéral, celles-ci peuvent représenter jusqu’à 50 % des revenus bruts selon le niveau d’équipement et le régime choisi.

Commençons par les coûts directs : ce sont ceux qui dépendent directement du soin. Le matériel, d’abord, doit être amorti sur sa durée d’usage réelle. Par exemple, un appareil de cryothérapie acheté 5 000 € et utilisé pour 1 000 séances coûte 5 € par soin en amortissement. Il faut ajouter les consommables (gel, électrodes, gants, lingettes), souvent sous-estimés, mais indispensables.

À cela s’ajoutent les coûts indirects, liés au fonctionnement du cabinet : loyer, électricité, entretien, assurance professionnelle, abonnements logiciels métier comme Milo, matériel de bureau, comptabilité, etc. Ces frais doivent être répartis sur le nombre moyen de séances effectuées par mois. Par exemple, un cabinet dont les charges fixes s’élèvent à 2 000 € pour 250 actes mensuels supporte un coût structurel de 8 € par acte.

Enfin, il faut inclure le temps invisible, celui que vous ne facturez pas : préparation du matériel, désinfection, rédaction de la facture, échange administratif avec le patient. Dix minutes par séance représentent déjà une perte équivalente à près de 15 % de votre temps productif. Ce “coût caché” doit donc être intégré dans la construction du prix final.

Charges sociales et fiscales des kinés en 2025 : les nouvelles règles à connaître pour un soin hors nomenclature

La rentabilité réelle d’un acte ne peut être comprise sans tenir compte des cotisations sociales et fiscales. Depuis 2025, les professionnels libéraux relèvent d’un nouveau cadre simplifié : l’assiette unique pour les cotisations et contributions sociales.

Cette réforme, actée par décret au 1ᵉʳ janvier 2025 (source : AGA France), prévoit que toutes les cotisations (maladie, allocations familiales, retraite de base, CSG-CRDS) soient désormais calculées sur un même revenu de référence : le bénéfice net après abattement forfaitaire de 26 %. Ce mécanisme a été conçu pour simplifier le calcul tout en maintenant une charge globale similaire à celle des années précédentes.

Pour un kiné libéral conventionné, la charge moyenne totale (URSSAF + CARPIMKO + CSG + CURPS + CFP) représente environ 22 à 25 % du bénéfice net, selon les données du SNMKR et de la CARPIMKO. Ce taux peut monter jusqu’à 28 % pour une activité majoritairement hors nomenclature, car la prise en charge partielle des cotisations maladie par la CPAM ne s’applique alors plus.

À cela s’ajoutent les cotisations ordinales, fixées à 280 € par an pour les libéraux par le Conseil national de l’Ordre des masseurs-kinésithérapeutes. Ces données sont publiques et stables pour 2025.

Autrement dit, pour chaque euro perçu en honoraires, environ 25 à 30 centimes partiront en cotisations et impôts. La rentabilité d’un soin doit donc être calculée en intégrant cette ponction structurelle, sans quoi vous sous-estimerez fortement votre coût réel.

Calculer le tarif minimum rentable d’un soin hors nomenclature

Une fois vos coûts identifiés et vos charges connues, il s’agit de déterminer le seuil de rentabilité d’un acte. La méthode la plus simple consiste à additionner les coûts directs et indirects, puis à ajuster pour tenir compte des charges sociales et d’une marge de sécurité.

Prenons un exemple concret, fondé sur des hypothèses réalistes pour un cabinet de kinésithérapie en 2025 :

  • coût du matériel et des consommables : 6 € par soin
  • coût structurel (loyer, énergie, assurance, logiciel, entretien) : 10 € par soin
  • coût du temps invisible : 4 €
    Le coût total “interne” s’élève donc à 20 €.
    En intégrant un taux global de charges sociales de 25 %, le tarif facturé doit être :
    20 € ÷ (1 – 0,25) = 26,66 €.

Ce montant représente le tarif plancher : celui qui vous permet de couvrir vos charges sans bénéfice supplémentaire. Pour construire une marge cohérente (investissement matériel, formation, périodes creuses), il est conseillé d’ajouter 10 à 20 % de marge. Le tarif “rentable et durable” s’établirait alors autour de 30 à 32 € la séance.

Cette logique mathématique doit être adaptée à votre positionnement : un soin technique de 20 minutes utilisant un appareil spécifique ne sera pas valorisé de la même façon qu’une séance de 45 minutes de rééducation personnalisée. Plus le soin exige de matériel, de technicité ou d’investissement, plus la marge doit être significative.

Trouver l’équilibre entre rentabilité, éthique et acceptabilité patient

La rentabilité économique n’est pas une fin en soi : elle doit s’articuler avec votre éthique professionnelle et la perception du patient. Un soin hors nomenclature n’est viable que s’il est compris, accepté et valorisé. Cela suppose de justifier clairement le tarif : pourquoi ce soin n’est-il pas remboursé ? Quelle valeur ajoutée apporte-t-il ? Quelle expertise ou quel matériel spécifique mobilise-t-il ?

La transparence est ici la meilleure garantie de confiance. Un devis clair, une fiche explicative ou un affichage des tarifs au cabinet permettent d’éviter tout malentendu. Vous avez le droit de valoriser votre savoir-faire, mais l’obligation de le faire en toute loyauté.

Enfin, la perception du prix dépend aussi du contexte : dans un bassin urbain à forte concurrence, un tarif trop haut peut dissuader, tandis que dans un cabinet à image experte (sport, rééducation post-opératoire, maternité), une tarification supérieure peut être pleinement légitime. L’essentiel est que le prix soit cohérent avec l’expérience vécue par le patient.

Alors, êtes-vous prêt à calculer la vraie valeur de vos soins hors nomenclature ?

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