CPTS : pourquoi s'y intéresser en tant que kiné (et comment s’y impliquer en pratique)
Imaginez la scène. Un patient pousse la porte de votre cabinet, souffrant d’une entorse de cheville. Jusqu’à hier, il aurait fallu une ordonnance du médecin pour débuter sa rééducation. Mais depuis l’expérimentation lancée en 2025, dans certains territoires, ce patient peut consulter directement son kinésithérapeute grâce à la CPTS kiné de son secteur. Ce n’est pas un simple ajustement administratif, mais une petite révolution. Pour la première fois, le kinésithérapeute libéral est reconnu comme un point d’entrée dans le système de soins. Cette transformation s’inscrit dans un mouvement plus large : les Communautés Professionnelles Territoriales de Santé (CPTS), conçues pour mieux organiser l’offre de soins en ville et répondre aux défis des déserts médicaux. Et si, derrière ces trois lettres parfois floues, se cachait en réalité la grande opportunité de la décennie pour les kinés libéraux ?
De la loi Rist à l’accès direct : comment la CPTS redéfinit la kiné
Les CPTS ne datent pas d’hier. Elles ont été créées par la loi du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé. Leur mission ? Regrouper des professionnels de santé d’un même territoire (médecins, pharmaciens, infirmiers, kinés, sages-femmes, établissements médico-sociaux, associations) autour d’un projet de santé partagé.
En pratique, une CPTS a plusieurs fonctions : faciliter l’accès aux soins, organiser les parcours complexes, développer la prévention, améliorer la pertinence des prises en charge et soutenir les professionnels de santé du territoire.
Mais le véritable tournant pour la kinésithérapie est récent. La loi Rist a ouvert la voie à l’accès direct des patients aux kinés, uniquement si ces derniers exercent dans une CPTS.
Concrètement, un kinésithérapeute membre d’une CPTS peut désormais recevoir un patient sans ordonnance pour certaines pathologies (traumatologie bénigne, douleurs musculo-squelettiques simples), avec un plafond de huit séances si aucun diagnostic médical n’a été posé. À l’issue, il doit transmettre un compte rendu au médecin traitant et l’inscrire dans le Dossier Médical Partagé.
Autrement dit : l’avenir du CPTS kiné est intimement lié à l’évolution de la profession vers plus d’autonomie et de responsabilités dans le parcours de soins.
Entrer dans une CPTS : le choix stratégique pour les kinés libéraux
La CPTS, tremplin pour la légitimité des kinés
S’impliquer dans une CPTS, c’est accepter de ne plus travailler uniquement dans son cabinet, mais d’apparaître dans un réseau coordonné. Cette visibilité est précieuse. Les médecins, infirmiers, pharmaciens et institutions locales identifient le kinésithérapeute comme un acteur pivot des parcours de soins, et non comme un “simple exécutant de prescriptions”.
Accès direct : quand la CPTS kiné ouvre la porte à une nouvelle patientèle.
Dans les départements expérimentaux, l’accès direct en CPTS kiné attire une nouvelle patientèle. Ceux qui n’osaient pas consulter par crainte de déranger leur médecin franchissent désormais le pas. Dans les territoires pilotes, certains kinés observent déjà une augmentation de 15 à 20 % de patients vus en première intention.
Avec la CPTS, les kinés enfin acteurs des projets collectifs
Les CPTS déploient de nombreux projets : ateliers de prévention des chutes pour les seniors, programmes d’éducation thérapeutique pour la BPCO, suivi coordonné après hospitalisation. Autant d’initiatives où la kinésithérapie est indispensable. En y participant activement, le kiné contribue à donner du poids à sa profession dans les décisions de santé publique.
Le revers de la médaille : ce qui freine encore les kinés en CPTS
Évidemment, l’aventure n’est pas sans contraintes. Beaucoup de kinés hésitent encore pour plusieurs raisons.
D’abord, la charge en temps : réunions, groupes de travail, rédaction de bilans… Ce temps pris sur l’agenda patient peut sembler difficile à absorber. Ensuite, le risque d’être relégué : si les kinés ne s’impliquent pas, les projets de santé risquent d’être pensés sans eux, laissant la kinésithérapie en marge. Enfin, la fragilité réglementaire : l’accès direct reste une expérimentation. Rien ne garantit, pour l’instant, sa pérennité.
Mais l’histoire montre que ceux qui s’engagent tôt sont souvent ceux qui pèsent le plus lorsque les règles se stabilisent.
Intégrer une CPTS : la feuille de route du kiné
Entrer dans une CPTS ne veut pas dire tout révolutionner du jour au lendemain. Voici un chemin progressif, réaliste et efficace.
Commencez par identifier la CPTS de votre territoire via l’URPS kiné ou l’ARS. Participez à une réunion d’information, même comme observateur. Vous comprendrez rapidement qui sont les acteurs moteurs, quels projets sont en cours, et où vous pourriez apporter votre valeur.
Ensuite, proposez une action pilote simple. Par exemple, un atelier mobilité pour seniors, un dépistage postural dans une école ou une coordination renforcée post-hospitalisation. Ces initiatives concrètes permettent de montrer la valeur ajoutée du kiné, sans s’enliser dans la lourdeur administrative.
Peu à peu, vous pouvez rejoindre un comité de gouvernance, participer à l’écriture du projet de santé, et défendre la place de la kinésithérapie dans les parcours territoriaux. L’important n’est pas de tout faire d’un coup, mais d’avancer étape par étape.
CPTS : l’opportunité à saisir pour façonner l’avenir de la kiné
Le mot CPTS kiné n’est pas qu’un sigle administratif. C’est une opportunité historique de repositionner la kinésithérapie libérale comme un acteur majeur de la santé de proximité. Oui, cela demande du temps, de la méthode et de l’audace. Mais ceux qui franchissent le pas aujourd’hui seront les figures de référence de demain.
Rester à l’écart, c’est courir le risque que d’autres décident à votre place. Entrer dans la dynamique, c’est façonner l’avenir de la kinésithérapie en France.
FAQ – Tout comprendre sur la CPTS kiné
CPTS ça veut dire quoi ?
Les CPTS (communautés professionnelles territoriales de santé) rassemblent des médecins et des soignants qui décident, de leur propre initiative, de collaborer au service d’une même population sur un territoire donné.
Quelles sont les missions d’une CPTS ?
Gestion des soins non programmés, articulation entre ville et hôpital, dynamisation de l’attractivité médicale locale, collaboration médecins-infirmiers pour favoriser le maintien à domicile… Les CPTS ont pour vocation de renforcer l’organisation collective des professionnels de santé et d’améliorer leur coordination.
Qui finance les CPTS ?
Les CPTS disposent de deux principales sources de financement : d’une part, les crédits du Fonds d’intervention régional (article L. 1435-8 du Code de la santé publique), attribués par l’ARS ; d’autre part, les financements versés par les caisses régionales d’Assurance Maladie.
Quelle est la différence entre une CPTS et une maison de santé ?
La MSP propose une réponse de proximité, centrée sur le patient, grâce à une coordination organisée autour d’une patientèle. La CPTS, quant à elle, vise une coordination collective à l’échelle d’un territoire, afin de répondre aux besoins de santé de l’ensemble de sa population.
Alors, prêt à pousser la porte de votre CPTS ?