Physiothérapie et kinésithérapie : quelle différence ?
2 mai 2024 - Installation en libéral
Non vous ne rêvez pas, il est bel et bien possible de devenir kiné quand on est malvoyant ! Lilian, 30 ans, masseur-kinésithérapeute à Toulouse en est la preuve. 🐕🦺 Son signe distinctif ? Son labrador de 4 ans, Sorya, qui l’accompagne au quotidien. Lilian est déficient visuel depuis ses 18 ans ce qui ne l’a pas empêché de suivre son rêve : devenir kinésithérapeute ! Nous sommes allés à sa rencontre pour en savoir plus sur la pratique de la kinésithérapie en étant malvoyant.
Bien sûr, je m’appelle Lilian, j’ai 30 ans et je suis kiné à Toulouse. Je suis atteint d’une pathologie dégénérative depuis mes 18 ans… Du jour au lendemain j’ai basculé dans un nouveau monde d’handicap où tu vois des gens qui ne voient plus du tout, des gens avec des chiens d’aveugle, avec une toute nouvelle vie et structure adaptée à la malvoyance…
J’exerce principalement à mon cabinet. Même si je suis accompagné de Sorya mon adorable chien guide, aller de patients en patients n’est pas des plus pratique pour moi. Il m’arrive tout de même de faire des exceptions de temps en temps.
Depuis mon plus jeune âge, je suis fasciné par le fonctionnement du corps humain et les mécanismes de la réadaptation. Malgré ma déficience visuelle, j’ai toujours été actif et intéressé par le mouvement et le sport. Quand j’ai découvert l’existence des écoles de kiné pour malvoyant proposant une formation de kiné malvoyant adaptée, ce fut une révélation ! L’idée de pouvoir aider les autres grâce à mes compétences, en utilisant mes autres sens comme atouts, m’a profondément motivé. J’ai donc entrepris les démarches pour intégrer une école de kiné malvoyant et me voilà quelques années plus tard…
La formation est exactement la même que les kinésithérapeutes qui suivent la formation « normale », elle se déroule en 4 ans et suit le référentiel national, mais avec des adaptations pédagogiques. On met l’accent sur le développement du toucher, l’ouïe et le sens kinesthésique. Concrètement, cela se traduit par :
Assez compliqué de répondre mais je dirais que déjà intégrer une école spécialisé n’est pas si facile puisqu’en France, il existe 4 écoles qui forment les déficients visuels au métier de masseur-kinésithérapeute. Les promotions sont au maximum de 20 étudiants mal ou non voyant, les supports pédagogiques sont en braille, en dessin en relief, enregistrement sonore et on utilise aussi des maquettes.
L’adaptation aux nouvelles technologies et l’accessibilité de certains appareils de physiothérapie peuvent être complexes. Par exemple, les écrans tactiles posent des difficultés. Mais on travaille en étroite collaboration avec les formateurs, les associations comme l’UNAKAM et les fabricants pour trouver des solutions innovantes. L’intégration dans les stages peut aussi parfois nécessiter des adaptations en amont avec les lieux d’accueil, pour une prise en charge optimale.
Je leur dirais de ne pas hésiter un seul instant ! C’est un métier passionnant et profondément humain. Il faut être motivé, persévérant, avoir confiance en ses capacités. Surtout, il ne faut pas avoir peur de demander de l’aide et des adaptations. Les écoles de kiné malvoyant et la formation de kiné malvoyant sont des tremplins formidables.
Ma déficience visuelle a profondément influencé ma pratique, en affinant considérablement mes autres sens, et plus particulièrement le toucher, qui est devenu mon principal outil de diagnostic et de traitement. Cette acuité tactile me permet d’appréhender le corps du patient avec une finesse que je n’aurais peut-être pas développée autrement. Concrètement, cela se manifeste de plusieurs manières :
Indéniablement. La formation kiné malvoyant m’a appris à compenser mon manque de vision par d’autres compétences. Cela me permet d’avoir une approche plus holistique et centrée sur le patient. De plus, cela crée souvent un lien de confiance unique avec les patients, qui apprécient mon attention et ma sensibilité.
Pour exercer mon métier de kiné malvoyant au quotidien, je m’appuie sur un ensemble d’outils et d’adaptations qui me permettent de travailler en toute autonomie et efficacité. Sur le plan informatique, j’utilise des logiciels de lecture d’écran performants qui me restituent vocalement le contenu affiché, des plages brailles pour une lecture tactile des informations et des logiciels de reconnaissance vocale pour la prise de notes lors des consultations et la gestion des dossiers patients. Ces outils me permettent d’accéder aux informations, de les traiter et de les organiser de manière autonome.
L’organisation de mon environnement de travail est également primordiale. J’ai aménagé mon cabinet de manière à ce qu’il soit clair, rangé et doté de repères tactiles au sol et sur le mobilier. Ces repères me permettent de me déplacer aisément et en toute sécurité dans l’espace, optimisant ainsi mon temps et mon efficacité. Enfin, une communication ouverte et collaborative avec mes collègues est essentielle. Pour certaines tâches spécifiques qui nécessitent une vision, comme la lecture de radiographies ou l’utilisation de certains appareils, je peux compter sur leur aide et leur expertise. Cette collaboration est basée sur la confiance et le respect mutuel, et elle contribue à une prise en charge globale et de qualité des patients.
Je les invite à dépasser leurs préjugés et à venir expérimenter une séance. Ils constateront par eux-mêmes que notre handicap ne nous définit pas et que nous sommes avant tout des professionnels compétents, passionnés et pleinement investis dans notre métier. La formation kiné malvoyant que nous avons reçue au sein d’une ecole de kine pour malvoyant nous a préparés de manière rigoureuse et adaptée à exercer pleinement cette profession. Nous avons développé des compétences spécifiques, notamment une acuité tactile et une écoute attentive, qui sont de véritables atouts dans la relation avec le patient et dans la qualité des soins que nous prodiguons. Nous sommes des kinésithérapeutes à part entière, capables d’apporter une prise en charge efficace et humaine.
À mon sens, la mission première de l’UNAKAM (Union Nationale des masseurs-kinésithérapeutes Aveugles et Malvoyants) est de représenter et d’accompagner les kinés malvoyants dans leur parcours professionnel. Il représente un soutient tant sur les aspects financiers, juridiques que les aspects techniques, afin de nous permettre d’exercer notre métier dans les meilleures conditions possibles.
Une part importante de leurs actions consiste à veiller à l’accessibilité des formations kiné malvoyant au sein des écoles de kiné. Ils doivent s’assurer que les cursus soient adaptés aux besoins spécifiques des étudiants avec des déficients visuels. Il joue également un rôle actif dans l‘insertion professionnelle de leurs adhérents. Notamment en les mettant en relation avec des employeurs potentiels et en les conseillant dans leurs démarches.
L’UNAKAM se positionne comme un lien essentiel entre les professionnels kiné malvoyant, les institutions de formation, les instances ordinales et les pouvoirs publics. L’objectif est de défendre les intérêts de la profession et de promouvoir l’inclusion. La lutte contre les préjugés et les stéréotypes liés au handicap visuel dans le milieu professionnel est également un combat constant sur lequel l’UNAKAM doit travailler. Cela se passe au travers d’actions de sensibilisation auprès du grand public, des professionnels de santé et des employeurs, afin de valoriser les compétences et les qualités des kiné malvoyants.
👏🏻 Merci à Lilian d’avoir partagé un petit bout de son quotidien en tant que kiné malvoyant ! Si vous aussi, vous avez un parcours atypique et que vous souhaitez en parler avec nous, n’hésitez pas !
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